Occitan

    L'occitan est encore aujourd'hui considéré, à tort, comme un simple patois de 'paysans', sans passé et sans avenir. C'est pourtant une langue parlée et comprise, avec de nombreuses variantes, dans environ trente-trois départements méridionaux français, dans douze vallées du Piémont Italien et dans le Val d'Aran en Espagne. Et bien plus qu'une simple langue, c'est surtout toute une culture et une histoire fabuleuses qu'elle promène avec elle.

limite langue d'oil/langue d'oc

    En effet, la France était autrefois géographiquement séparée en deux (Nord et Midi) : du néolithique ( - 5000 ans avant Jésus-Christ) jusqu'au second millénaire avant notre ère, une zone forestière traçait une véritable barrière, avec l'aide de nombreux massifs, dont le Jura Central, la Bresse, le Nivernais, le Bourbonnais, la Sologne et la Brenne, laissant un passage près de l'océan. De plus, cette "cloison" correspondait plus ou moins à la limite entre les deux climats prédominants : les étés secs du Midi, et les saisons humides du Nord.
Les civilisations se sont ainsi développées, sous des influences très différentes : latines au Sud, germaniques au Nord. Cela se ressent dans la linguistique, dans l'histoire, dans les traditions...
Peu à peu, dès le VIII siècle av J.-C., le gallo-romain méridional se transforme et donnera naissance à la Langue d'Oc, tandis que la version septentrionale deviendra la Langue d'Oil, plus proche du Français actuel.
La Langue d'Oc a connu une évolution mouvementée, de même que sa graphie.

Les différents dialectes de France

Les premiers scribes occitans ont dû adapter le système ortographique latin, peu compatible à une langue romane orale populaire ; il perdurera juqu'au XVe siècle.
Après la croisade contre les Albigeois (15..), l'Occitan est disgrâcié, chassé de l'école et de la vie administrative, avant d'être officiellement interdit en 1539 par l'édit de Villers-Cotterêts. Cependant, cette prohibition ne touche que peu le peuple, qui persiste à parler sa langue, mais en perd la graphie. Pour écrire, il ne leur reste que le système ortographique français, et chacun se met à l'écrire à sa manière, donnant ainsi naissance à ce que l'on appelle désormais les graphies patoisantes de la Langue d'Oc, jusqu'au XIXe siècle.
Vient l'époque des troubadours, et dès la fin du XVIe siècle, les tentatives de normalisation graphique se multiplient. En 1840, Honnorat, originaire des Alpes provençales, propose un dictionnaire permettant l'intercompréhension des dialectes en respectant leurs différences ; il s'est basé pour cela sur un système orthographique très proche de celui des troubadours.
Roumanille, un des fondateurs de l'école littéraire du Felibrige, à Avignon (1854), est propice à cette graphie, puis la rejette pour imposer un système d'écriture plus française, rhodanienne. Cette graphie félibréenne est généralement nommée graphie mistralienne, à tort car Frédéric Mistral l'accepta avec difficulté. Elle fût la graphie de la renaissance littéraire occitane du XIXe siècle, avant tout localisée en Provence.
Dès 1896, les Languedociens reprennent et modernisent la graphie des troubadours. Y travaillent principalement Joseph Roux, limousin, et l'Escola Occitana de Perbòsc et Estieù, fondée en 1919. A nouveau vulgarisée en 1930 par la Société d'Etudes Occitanes, cette graphie sera perfectionnée en 1935 par Louis Alibert, via un ouvrage de grammaire, puis un dictionnaire, publié post-mortem (1966) par l'Institut d'Etudes Occitanes.

Cette graphie Occitane, dite classique, permet à tous les dialectes occitans français de se comprendre, bien que subsistent encore des différences de prononciation et d'écriture. Elle permet de plus de lire les troubadours dans leurs propres textes. C'est le système ortographique majoritairement utilisé en Occitanie, hormis en Provence, où prédomine toujours la graphie félibréenne.

Après la guerre, l'Occitan s'est de plus en plus perdu ; nombre de parents préféraient parler en Français à leur enfants, pour leur éviter des représailles à l'école. La langue avait glissé lentement dans le passé ; pour certains, les patois représentent encore l'ancien temps, mais on observe à présent un engouement des jeunes, petits-enfants de ceux qui ne l'ont plus parlée, pour la réapprendre, renouer le fil conducteur de l'histoire et de la culture d'Occitanie. Il est désormais possible de l'apprendre à l'école, dans de nombreuses associations, dans différents ouvrages... Il y a même des écoles bilingues, hélas privées pour la plupart. Cependant cette onde tend à se briser, non pas par manque d'intérêt ni d'envie, mais par volonté statale (diminution de postes au CAPES, suppression de nombreuses classes...). L'Occitan doit-il finir son existence mouvementée dans l'oubli ?

carte d'enseignement bilingue Français/Langue régionale

L'Occitanie est un ensemble de territoires où la langue, l'histoire et la culture sont proches. On y a parlé l'Occitan pendant des siècles. Cette langue romane se distingue de l'ancien français par un caractère plus profond et plus durable de la romanisation, ainsi que par une influence germanique plus faible.
La culture Occitane, c'est également une littérature de plus de 1000 ans dont les textes les plus anciens remontent bien avant le Xe siècle. Vers la fin du XIe siècle, l'Occitanie médiévale se présente comme un ensemble socio-culturel d'une incontestable maturité. Depuis les troubadours du Moyen-Age, initiateurs de la littérature courtoise, jusqu'aux nombreux écrivains contemporains, en passant par la renaissance littéraire et bien d'autres, cette littérature surprend par son originalité et son extraordinaire fécondité.
Cette culture, c'est aussi la richesse d'un patrimoine oral exceptionnel, d'une littérature orale d'une singulière universalité, de toute une civilisation, de ses coutumes et traditions, croyances, de sa cuisine, de tous ses savoir-faires, ses métiers, sa science agricole, de la toponymie...
On compte environ deux millions de personnes qui parlent régulièrement Occitan, et environ six millions de personnes qui le comprennent, le parlent un peu, et qui n'auraient besoin que d'une légère immersion pour le parler correctement.


Quelques repères historiques :
1002 : Premier texte connu en langue occitane
XIéme au XIIIéme siècle : Apogée de la poésie lyrique occitane.
1756 : Parution du Dictionnaire Languedocien-Français de l'abbé de Sauvages.
1790 : Circulaire de l'abbé Grégoire sur les Patois de France.
1802 : Traduction en occitan d'Anacréon par Louis Aubanel.
1804 : Fabre d'Olivet publie Le Toubadour, poésies occitaniques du XIIIéme siècle
1819 : Publication du Parnasse occitanien de Rocheguide.
1842 : Histoire politique, religieuse et littéraire du Midi de la France par Mary-Lafon
1846 : Publication du dictionnaire Provençal-Français du docteur Honnorat.
1854 : Fondation du Félibrige (groupe amical, composé de félibres, fondé par Joseph Roumanille à Avignon et dont Aubanel ou Mistral feront partie).
1859 : Publication de Mirèio (Mireille) par  Mistral.
1885 : Publication du Tresor du Felibrige
1919 : Fondation de l'Escòla Occitana
1935 : Publication de la Gramatica Occitana de Louis Alibert
1941 (24 décembre) : Carcopino (Ministre de l'instruction publique sous le régime de Vichy), autorise l'enseignement des langues "dialectales" telles que le Breton ou l'Occitan dans les écoles primaires.
1943 (1er décembre) : Première chaire de Languedocien à Toulouse.
1945 : Fondation de l'Institut d'Etudes Occitanes.
1951 : La loi "Deixonne" autorise à titre facultatif, l'enseignement des langues régionales.
1959 : Création du Parti Nationaliste Occitan (P.N.O) par François Fontan.
1972 : Première université occitane d'été.